‘’ Où manque la force, le droit disparaît ; où apparaît la force, le droit commence de rayonner.’’ - Maurice Barrès.
Dans une république l’exigence de la redevabilité doit être un processus qui permet à toute personne ayant géré le bien commun de répondre de sa conduite dans le cadre d’un mandat bien déterminé. Ce mécanisme permet de garantir la bonne gouvernance et d’éviter tout accaparement des ressources publiques à des fins d’enrichissement personnel. C’est l’une des raisons pour lesquelles les populations avaient opté pour la rupture en 2012. Mais cette culture de la transparence ne doit pas amener l’Etat à abuser de la force régalienne pour régler des comptes personnels au risque d’implanter un régime dictatorial.
Plongés dans une grosse panique, suite à leurs déconvenues du 29 juin, les tenanciers de ce régime sentent le besoin pressant d’instaurer la terreur dans les rangs de l’opposition pour préserver leur pouvoir chancelant. Par le biais de leur levier à double vitesse, ils ont décidé de procéder à des interrogatoires tous azimuts pour mettre sous l’éteignoir d’imminents responsables de l’opposition. Cette réaction instinctive en plus d’être une démarche infructueuse traduit l’échec d’un gouvernement sans programme ni vision.
A force de vouloir détruire, à partir d’accusations fantaisistes, certaines personnalités de l’opposition, le chef de l’exécutif dévoile devant le monde entier les failles béantes du corps judiciaire. Une institution où les magistrats jouent le rôle de suppôt des gouvernants. Cet appareil judiciaire fortement tributaire des politiques, qui nomment et dégomment les hauts responsables, a-t-il d’autres choix que de se mettre sous la botte des donneurs d’ordre ? Le Sénégal ne peut pas se doter d’un outil de production industriel sans une justice impartiale, une justice qui fait du principe de l’intérêt général un service sacerdotal. Malheureusement, au lieu d’apporter le changement tant promis, par rapport à ce qui se faisait avant, ce système liberticide s’enlise dans le gangstérisme judiciaire.
Pendant que le leader de l’opposition, Karim Wade, est embastillé sur la base de fausses dépositions, claironnées par l’étudiant en philosophie Souleymane Jules Diop, et que son compagnon libéral Abdoulaye Baldé est traqué comme un malpropre d’autres responsables, qui se sont enrichis, en un temps record, bénéficient d’un label d’impunité. Ils se sont vus frayer des avenues simplement parce qu’ils ont trouvé un arrangement convenable en choisissant le nomadisme politique ou parce qu’étant des complices de ce régime. Au delà de ceux dont les rapports des inspections de contrôle ont pris la main dans le sac, comme Awa Ndiaye, Modibo Diop et Baïla Wane, le cas de l’ancien premier ministre par accident, Souleymane Ndéné Ndiaye, est l’illustration parfaite de cette parodie de justice.
Ce nullissime avocat qui, avant la prise du pouvoir en 2000, n’avait jamais gagné de procès, est devenu, sur une période de 8 ans, propriétaire de bâtisses que ses revenus ne sauraient justifier même en l’espace de 20 ans. Jamais ce cartouchard n’a été inquiété et mieux il écume comme bon lui semble l’air de la liberté au point de faire du jeu des billards dans les discothèques son passe temps favori. Si la loi était appliquée en toute objectivité, il n’aurait jamais échappé des glaives de dame justice. Sous l’égide de cette gouvernance autocratique, la magistrature a, nonobstant les élucubrations comiques de Jules Diop, soustrait de la vindicte de la justice des carnassiers avérés de la chose publique simplement parce qu’ils sont proches de Macky Sall ou de son beau frère, Mansour Faye.
Le peuple sénégalais n’a plus besoin de microscope pour savoir que ces mises en scène judiciaires ne sont rien d’autre que des exercices de manipulations politiciennes. Le droit ne peut être appliqué injustement sur le Président Karim Wade et moins sur d’autres. Mais ce régime honni, qui a perdu toute légitimité, ne peut plus s’arroger le droit de séquestrer continuellement le leader de l’opposition au risque de se faire défénestrer par la rue. Les sénégalais ont soif de changement peu importe le procédé. Qui sait ? Peut être que cette solution ultime sera le chemin le plus opérationnel pour rétablir cet Etat de droit qui fait actuellement défaut.
Moïse RAMPINO