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Démission de l’ex-PM du MPS : quelles leçons peut-on en tirer?

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Démission de l’ex-PM du MPS : quelles leçons peut-on en tirer?

Par Senior Mbary

Depuis 48 heures, les médias en ligne ont annoncé la démission de l’ex-Premier Ministre, Mr Joseph Djimrangar Dadnadji. Dans sa lettre de démission, l’ex-PRM a déclaré en substance « Je ne me reconnais plus dans le parti dans lequel j’ai milité et auquel j’ai fondé mes idéaux. Le MPS est devenu un ensemble de personnes mafieuses loin de mes idées premières, et loin de la gestion de la chose publique ».

Dans sa bande défilante, le journal en ligne Tchadactuel du 21 janvier 2015 est revenu sur cette démission en soulignant que le dictateur Deby, rancunier qu’il est, allait frapper d’une manière ou d’une autre. Oui en effet, dans ces genres de situation, Deby utilise généralement deux méthodes pour frapper s’il estime que l’acte posé touche à son honneur ou menace son pouvoir. S’il est gentil, il te fait dégager de ton poste de responsabilité (si tu es encore en fonction) et utilise l’instrument juridique pour te mettre en prison, surtout que pratiquement tous les cadres tchadiens trainent toujours des casseroles derrière eux. C’est donc la première méthode. S’il se réveille mal, il décide simplement de te supprimer et tous les moyens sont bons : assassinat par des tueurs à bord d’un véhicule non immatriculé, empoisonnement, accident de voiture, etc. Mr Djimragnar est donc averti et saura prendre ses dispositions car il en sait effectivement trop sur ce régime prédateur, surtout que Deby a l’intention de se pérenniser au pouvoir.

Mr Djimrangar, faisait partie de tout ce que le Tchad avait de meilleurs comme juristes dans les années 2000 (Mangaral Banté, Nagoum Yamassoum, Jonathan Djatto, Yokabdjim Mandiguim, Pascal Yoadimnadji, etc) qui ont été coptés par le régime, à travers l’ONG, GERDES, pour organiser les premières élections présidentielles de 1996 et les suivantes. Tous ces cadres dont Djimrangar, qui constituaient et continuent d’ailleurs à être le socle du pouvoir MPS, savent très bien que Deby n’a jamais gagné les élections mais pour leur vie, ils sont obligés de se taire, comme un prêtre qui, tenu par le secret de la confession, est obligé de se taire. Même Mr Djimragnar, aujourd’hui dehors, restera toujours de marbre.

Mais au-delà de la pourriture qui caractérise le pouvoir MPS, quelles leçons peut-on tirer de cette démission de l’ex-PM qui a été au cœur de ce pouvoir pendant plus de 20 ans ? J’en ai enregistrées essentiellement deux que je vais partager avec les lecteurs.

La première et la plus importante est la saturation. En dehors du Clan Itno, tout le monde en a marre de ce pouvoir. Mr Djimrangar a été simplement plus courageux que les autres qui auraient bien voulu le faire aussi mais se sentent liés. Cette dose de courage qui est le tien, est en fait, cette marge de pouvoir, c’est-à-dire de liberté dont dispose tout être humain quelle que soit sa situation et ses conditions de vie, même un esclave. C’est cette petite marge de liberté du fond de chaque individu qui, mise bout à bout, conduit au soulèvement qui a renversé les dictatures les plus abjectes comme celle en place à N’Djaména sous d’autres cieux. Cette petite marge de liberté, sachez-le, aucun dictateur ne peut l’enlever sauf en liquidant physiquement la personne.

La seconde leçon est qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire les choses. C’est aussi par là qu’on reconnait la grandeur d’un homme : être capable de se remettre en cause, reconnaitre ses erreurs et repartir sur de nouvelles bases. Après plus de 20 ans à supporter le pouvoir malgré lui, puisque ses idéaux n’ont pas été honorés, Mr Djimrangar a pris la décision de se retirer, même s’il devra être privé des ressources. Même si c’est rare au Tchad, on a vu des cadres du parti et ministres démissionner pour ne pas trahir leur conscience. C’était le cas d’un certain Dr Yomadji Oscar, membre du bureau politique du MPS et ancien ministre et Mr Youssouf Togoimi, ancien ministre également. Ils ne sont plus de ce monde, certes, mais ils sont partis dignes.

Finalement, toux ceux qui, autour du pouvoir, sont là par opportunisme pour profiter et s’enrichir ne doivent pas être gênés par les dérives d’injustice et de violence du pouvoir MPS qui crèvent les yeux ; en revanche, tous ceux qui pensent que leurs idéaux ont été trahis, comme Djimrangar, et qui continuent de rester, sont simplement des lâches et cette lâcheté va les rattraper taux ou tard puisque la roue de l’histoire tourne.

Senior Mbary.


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